Les deux moments des fiançailles juives
Sauf mariage relevant de catégories exceptionnelles, comme le mariage de Samson, les Israëlites distinguaient deux temps dans le mariage : l’accord sur le mariage et le mariage proprement dit. C’est le premier acte (ארשׁ en hébreu) qu’on appelle ici les « fiançailles ».
Les fiançailles réglaient l’accord entre les deux familles. Elles étaient liées au paiement du mohar (2 S 3, 14 ; 18, 25), dons fait par le futur mari. Sans doute cet accord était-il accompagné d’une fête (cf. Jude, 14, 10). La femme « fiancée » n’était pas encore appelée « épouse » (à la différence, semble-t-il, de l’usage en Assyrie et Babylonie) ; son statut toutefois était modifié (Ex 22, 15). Toute infidélité était sévèrement punie, car elle portait atteinte à des droits acquis (Dt 22, 23-27 ; 28, 29). Les fiançailles pouvaient durer assez longtemps et dans ce cas le fiançé était dispensé de service militaire (Dt 20, 7).
Les fiançailles prenaient fin, soit par rupture du contrat entre les familles, soit par tradition de la jeune fille à son mari. Normalement celui-ci la prenait chez lui ; mais il suffisait que le père ait mis à sa disposition une chambre où il pût trouver celle qui était désormais sa femme (Tb 8, 18). C’est sans doute au moment où la jeune fille abandonnait la protection paternelle qu’elle recevait une bénédiction, avec souhaits pour sa fécondité (Gn 24, 60 ; Ruth 4, 11ss ; Tb 10, 11 ss).
Les fiançailles de Joseph et de Marie s’expliquent en fonction de ces institutions. Marie a été fiancée (en grec μνηστευεσθαι ; c’est la traduction constante des Septantes pour l’hébreu) à Joseph (Mt 1, 18). Celui-ci ne l’a pas encore prise chez lui, ou d’une manière plus générale ils n’ont pas encore habité ensemble, lorsqu’il s’apperçoit qu’elle est enceinte. Il peut rompre le contrat et songe à le faire discrètement, lorsqu’une intervention surnaturelle le fait changer d’avis.