Suivez l’exemple de notre Sauveur qui a voulu subir sa Passion afin d’apprendre la compassion, s’assujettir à la misère afin de comprendre les misérables. De même qu’il « a appris l’obéissance par ce qu’il a enduré » (He 5, 8), il a voulu apprendre aussi la miséricorde… Peut-être allez-vous trouver bizarre ce que je viens de dire du Christ : lui qui est la sagesse de Dieu (1 Co 1, 24), qu’a-t-il pu apprendre ?…
Vous reconnaissez qu’il est Dieu et homme en une seule personne. En tant que Dieu éternel, il a toujours eu connaissance de tout ; en tant qu’homme, né dans le temps, il a appris beaucoup de choses dans le temps. Puisqu’il a commencé d’être dans notre chair, il a aussi commencé d’apprendre par expérience les misères de la chair. Il aurait été plus heureux et plus sage pour nos premiers parents de ne pas avoir fait cette expérience, mais leur créateur est « venu chercher ce qui était perdu » (Lc 19, 10). Il a eu pitié de son œuvre et est venu la trouver, descendant miséricordieusement là où elle avait péri misérablement…
Ce n’était pas simplement pour partager leur malheur, mais pour compatir à leur misère et les en libérer : pour devenir miséricordieux, non comme un Dieu en son bonheur éternel, mais comme un homme qui partage la situation des hommes… Merveilleuse logique de l’amour ! Comment aurions-nous pu connaître cette miséricorde admirable si elle ne s’était penchée sur la misère existante ? Comment aurions-nous pu comprendre la compassion de Dieu si elle était restée humainement étrangère à la souffrance ?… A la miséricorde d’un Dieu, le Christ a donc uni celle d’un homme, sans la changer, mais en la multipliant, comme il est écrit : « Tu sauveras hommes et bêtes, Seigneur. Mon Dieu, comme tu as fait abonder ta miséricorde ! » (Ps 35, 7-8 Vulg).