La liturgie d’aujourd’hui nous invite à tourner notre regard vers le Fils de Dieu qui, sur la montagne, comme s’accordent à le rapporter les évangiles synoptiques, est transfiguré devant Pierre, Jacques et Jean, tandis que d’une nuée, la voix du Père proclame : « Celui est mon Fils, celui que j’ai choisi ; écoutez-le ».
Jésus est bien au centre de la scène de la Transfiguration. C’est vers lui que convergent deux témoins de la Première Alliance : Moïse le médiateur de la Loi et Elie le prophète du Dieu vivant. La présence de ces deux personnages ainsi que la voix venant du ciel nous montrent clairement que nous assistons à une théophanie, une manifestation de Dieu en son Fils Jésus-Christ. Comment ne pas penser ici aux théophanies dont Moïse et Elie furent témoins sur la montagne de Dieu, le Sinaï-Horeb (Ex 19,9s ; 24, 15-18 et 1 R 19, 8-18) !
Jésus apparaît totalement transfiguré par la gloire de Dieu. Et cette gloire suscite la frayeur chez les trois disciples ou plutôt cette crainte révérencielle que l’on éprouve en présence de la divinité. Mais elle provoque en même temps la joie de saint Pierre : « Maître, il est heureux que nous soyons ici ». Ce dernier se voit ainsi confirmé dans la confession de foi en la messianité de Jésus qu’il avait prononcée peu de temps avant comme nous le rapporte saint Matthieu dans son évangile : « Tu es le Christ le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16).
Mais si la vision et la voix venue du ciel confirment saint Pierre, elles ratifient aussi la révélation que Jésus avait faite à ses disciples après la confession de Pierre à Césarée. Cette révélation se trouve d’ailleurs être l’objet de sa discussion avec Moïse et Elie : cet « exode » dont Jérusalem va être le point de « départ » ; ce passage par la mort, nécessaire à l’entrée dans la gloire. Ainsi, la Transfiguration consacre la révélation de Jésus, Fils de l’homme (Dn 7) souffrant et glorieux, dont la mort et la résurrection accompliront les Écritures. D’ailleurs la voix du Père invite à écouter le Fils, à l’écouter lorsqu’il annonce qu’il doit aller à Jérusalem pour y souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, y être tué et le troisième jour ressusciter (Mt 16, 21). Jusqu’ici Pierre ne pouvait mettre ensemble la gloire et la souffrance. La Transfiguration lui donne de découvrir que le Fils du Dieu vivant ne pourra entrer dans la gloire et dans le plein épanouissement de sa dignité filiale que par la voie de la souffrance et de la croix.
Cette expérience anticipée de la gloire du Christ sera pour les trois disciples, que nous retrouverons un peu plus tard dans l’évangile sur une autre montagne, le Calvaire, un soutien pour leur foi dans leur participation au mystère de la Croix. N’est-ce pas le même rôle que joue pour nous toute rencontre authentique avec le Seigneur Jésus, en attendant d’être pleinement transfigurés en lui lors de son retour glorieux ?
Seigneur, en ce jour, que ta transfiguration jette une lumière éblouissante sur notre vie quotidienne et oriente notre esprit vers le destin immortel que cet événement contient !