Il existe un lien mystérieux entre la souffrance, l’offrande et le don de la vie, entre sacrifice et expansion.
Dans une de nos communautés en Inde, un homme ayant un handicap assez profond s’est noyé dans le puits. Il n’était chez nous que depuis peu de temps. Un vieillard, ami de son père, est passé et nous a dit : « Quand il s’agit d’une œuvre de Dieu, il faut qu’un juste meure pour que cette œuvre vive ».
J’ai la conviction profonde que l’homme ou la femme d’action et de rayonnement ne peut rien s’il elle ne s’appuie pas sur ces personnes qui acceptent leurs souffrances, leur immobilité et les offrent pour qu’elles soient sources de vie. Les hommes et les femmes de prière, cachés dans les monastères et les ermitages, et qui vivent parfois de grandes souffrances, sont comme les pompes cachées qui irriguent une terre desséchée. Certains parmi nous sont des tuyaux peut-être embourbés, d’autres pompent, et toute la terre est désaltérée.
Un vieillard ou un malade qui s’offre à Dieu peut devenir, dans une communauté, la personne la plus précieuse, le « paratonnerre » de la grâce, la « pompe secrète ». Il y a un mystère dans l’utilité secrète de ces personnes dont le corps est brisé, qui passent apparemment leurs journées à ne rien faire, mais qui demeurent dans la présence de Dieu. Leur immobilité les oblige à garder les yeux et le cœur fixés sur l’essentiel, sur la source même de la vie. Leurs souffrances et leurs agonies sont fécondes ; elles deviennent source de vie.
Regarde ta propre pauvreté, accueille-là, chéris-là, n’en aie pas peur, partage ta mort, car ainsi tu partageras ton amour, ta vie.